C'est la rentrée des casses (sociales) !
Après un été de polémiques passionnantes sur Médine et Sardou qui ont remplacé les traditionnelles controverses sur le burkini, la rentrée aurait dû être placée sous le signe de l’urgence sociale. L’inflation continue d’exploser. Le coût de la rentrée scolaire augmente de plus de 11%. L’essence dépasse de nouveau les 2 €. Des millions de gens doivent sauter des repas et renoncer à tous leurs loisirs. Les étudiants sont pris à la gorge par 600 € de dépenses supplémentaires par an. Et c’est aujourd’hui que la réforme des retraites entre en vigueur, volant 2 ans de vie aux travailleurs. Nous sommes face à une situation inédite où les habitants de la sixième puissance mondiale subissent des privations sur l’ensemble de leurs besoins essentiels. Alors que pendant ce temps les riches se gavent, les dividendes battent encore des records avec 46 milliards € au 1er semestre et la France décroche sa place sur le podium mondial du nombre de millionnaires.
Mais non. La priorité de la Macronie pour cette rentrée, par la voix de son nouveau Ministre de l'Éducation Gabriel Attal a pourtant été l’interdiction de l’abaya. La ficelle était grosse mais a parfaitement fonctionné : nous en avons donc repris pour des jours entiers de “débat” sur une mesure absurde, inapplicable, aux relents sexistes et islamophobes évidents, entrant par ailleurs en contradiction totale avec le principe essentiel de laïcité. 2ème initiative tout aussi brillante du Président de la République cette fois, kidnapper pendant 12h les chefs de partis de l’opposition pour papoter de tout et n’importe quoi sans bien sûr écouter ce qui lui est dit. Résultat : Emmanuel Macron a rejeté en bloc les 14 propositions que nous avions collectivement formulées avec la NUPES face aux urgences démocratique, sociale, et écologique. Pas de référendum sur les retraites, pas de blocage des prix, pas de hausse du SMIC. Rien du tout. Nada. Peanuts. Vous pourrez bien vous priver de repas braves gens.
Au-delà de ces opérations de diversion grossières, se cache le véritable fait politique du moment : le renforcement de l’arc réactionnaire confirmé par l’appel de Sarkozy à la grande union de Macron à Zemmour. Cela ne me surprend absolument pas, car la tendance est globale et que je peux en témoigner quotidiennement au parlement européen. Dans l’hémicycle à Bruxelles, comme en Suède, en Italie ou en Finlande, peut-être bientôt en Allemagne et dans de plus en plus d’Etats membres. Le rapprochement idéologique entre libéraux, conservateurs et extrême-droite est évident. La traduction électorale ou politique n’est qu’une question de temps et seule une gauche conquérante est en capacité d’y faire échec. C’est la leçon donnée par l’Espagne où nos camarades de Sumar, qui ont su tenir le rapport de force au sein du gouvernement de coalition avec les socialistes, ont réussi à mettre en échec les néo franquistes de Vox. Yolanda Diaz, la leader de Sumar, nous l’a dit très clairement aux Amfis : ne partez pas battus, rien n’est joué, on peut déjouer les pronostics, ne restez pas sur la défensive, défendez un agenda de conquête !
C’est effectivement le rôle que doit jouer la NUPES en France, malgré les difficultés qu’elle traverse aujourd’hui. Puisque nous manquerions de douceur, je vais donc vous parler d’amour : imaginez un flirt d’été sympathique dont le prochain date ne serait que deux ans plus tard. Qui pense sérieusement qu’il est possible dans ces conditions de construire une relation d’amour sérieuse ? C’est pourtant ce que propose Marine Tondelier, la secrétaire nationale des verts, de passer du coup de foudre de la NUPES l’an dernier (qui a quand même permis d’obtenir 151 députés !) à un “revoyons-nous fin 2024 pour la Présidentielle”. Quelle est l’idée ? Se battre pendant un an pour se piquer quelques sièges de députés européens et ensuite nous tomber dans les bras comme si rien ne s’était passé ? Cela n’est pas sérieux. Darmanin, Le Pen et les autres, eux, s’organisent. Nous n’avons pas le droit d’affaiblir la seule alternative crédible à leur projet mortifère.
Il est temps pour nos partenaires de passer des déclarations d’amour aux preuves d’amour. Nous sommes capables de travailler ensemble, nous l’avons encore démontré en portant un message commun au Président de la République. Mais nous devons avancer enfin sur le parlement de la NUPES, créer enfin des groupes locaux communs, nous mettre enfin autour de la table pour partir ensemble à toutes les échéances électorales à venir.
Je ne suis pas naïve, bien sûr que la question des élections européennes n’est pas dans la tête des français aujourd’hui. Mais elle est essentielle pour dessiner la suite, et notamment la candidature commune indispensable de la gauche en 2027 pour porter un programme de rupture. C’est pour cela que nous nous battons sans relâche pour continuer à convaincre les écologistes de renoncer à leur impasse solitaire. 82% des électeurs de la NUPES le veulent, les sondages disent que nous pouvons arriver en tête, l’espoir soulevé serait immense. La bataille pour l’unité est d’ailleurs relancée. Rien que la semaine dernière, Jérôme Guedj, Philippe Brun (PS) et Benoit Hamon ont défendu une liste commune. Générations se bat activement pour l’obtenir. Olivier Faure, le 1er secrétaire du Parti socialiste, ne l’a pas écartée. Les bruits de couloir au sein des journées d’été des écologistes montrent leurs doutes. A un moins d’un an des élections européennes, j’aurais pu vous dire je repars en campagne. Nous repartons en campagne avec notre logo insoumis. Nous savons le faire. Nous aurions pu le faire, notamment parce que je crois que nous n’avons pas à rougir de notre bilan. Mais ce n’est pas le choix que nous avons fait parce que nous croyons en la bataille de l’unité. Et, là où il y a la volonté, il y a un chemin.
Le débat que j’ai eu avec Marie Toussaint aux Amfis confirme que les arguments de fond contre l’union ne tiennent pas la route. J’aurais préféré qu’il se passe dans un cadre plus apaisé, que les huées fassent place à l’écoute, car je respecte profondément son engagement et ses combats. J’ai cependant pu mesurer l’attente immense des militants pour l’unité, l’incompréhension qui se transforme parfois en colère face aux stratégies de partis qui ne sont pas à la hauteur du moment politique que nous traversons.
Ne nous le cachons pas, l’opération tonitruante de Ségolène Royal, quoiqu’on en pense, a aussi permis d’imposer la question de la liste commune dans toutes les universités d’été de la NUPES. Les médias ont adoré. Et son initiative a eu au moins le mérite de jeter un pavé dans la mare. Tout ce qui permet de remettre le sujet sur la table est utile. C’est cela et uniquement cela que nous avons soutenu. On a besoin de tire-bouchons pour débloquer la situation et faire avancer l’idée d’une liste commune aux européennes. Mais vous nous connaissez, nous ferons attention à la qualité du breuvage à l’intérieur. Ses déclarations les jours suivants imaginant l’hypothèse farfelue d’un soutien de LFI à sa candidature en dehors de la NUPES n’engagent en revanche bien évidemment qu’elle. Ce scénario fantaisiste ajouterait de la confusion à la désunion, notre objectif étant au contraire la clarté et l’union. Nous disons d’ailleurs la même chose depuis le début : la question n’est pas le casting, mais l’objectif politique. Nous voulons défendre le programme commun de la NUPES et incarner l’alternance en France et en Europe. Et c’est pour cela que nous avons dit et redit que nous n’étions pas opposés à une tête de liste écologiste pour mener la liste commune.
La bataille pour la liste commune va s’intensifier grâce à l’initiative remarquable des orgas jeunesse de la NUPES qui ont rédigé un programme commun qu’ils présenteront la semaine prochaine. La réaction de nos partenaires devra être scrutée. Vont-ils jeter à la poubelle le résultat de deux mois de travail ? L’attente d’une jeunesse qui sait qu’elle n’a plus le temps ? Comment le justifier auprès des sympathisants de gauche qui se rendent bien compte que nos soi-disant désaccords insurmontables ne sont en réalité que des prétextes pour occulter de peu glorieux intérêts boutiquiers ? La bataille pour l’unité se jouera également dans la rue, en soutien aux mobilisations sociales à venir qui sont essentielles pour imposer notre agenda politique. D’abord le 23 septembre contre les violences policières et pour nos libertés, puis le 13 octobre pour les salaires et contre la vie chère. Elle se jouera enfin au Parlement européen où je mènerai bataille avec la délégation insoumise et mes collègues de la NUPES contre le retour de l’austérité, la réautorisation du glyphosate, la “pause environnementale” demandée par Macron et la fin des tarifs réglementés de l’énergie.
Nous avons du pain sur la planche : au boulot !