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Mais à quoi joue la Banque Centrale européenne ?

Billet d'humeur 6 décembre 2022

Lundi dernier, la Présidente de la BCE Christine Lagarde est venue nous rendre sa petite visite de routine dans notre commission des affaires économiques et monétaires du Parlement européen. Je ne me suis pas faite prier pour lui poser quelques questions sur sa politique monétaire actuelle et sur la façon dont elle va ajouter de la crise à la crise et faire payer les plus pauvres si elle persiste dans cette voie. Décryptage.

Depuis cet été, la Banque centrale européenne (BCE) a opéré un tournant dans la politique monétaire, notamment en augmentant de 2 points de pourcentage ses taux directeurs, les taux d’intérêt de référence pour toute la zone euro. En faisant cela, la BCE considère qu’elle contribue à lutter contre la très forte inflation qui a actuellement cours dans l’UE et la zone euro (supérieure à 10%) dans le but de la ramener proche de l’objectif des 2% qu’elle s’est fixé.


Lutter contre l’inflation. Jusque-là je peux être d’accord avec Christine Lagarde. L’inflation actuelle a des effets délétères pour les gens dans la mesure où les salaires, les prestations sociales et les pensions de retraite n’augmentent pas ou en tout cas pas dans les mêmes proportions que les prix. D’ailleurs, même Christine Lagarde a reconnu que 1) l’inflation provenait essentiellement de la hausse des prix de l’énergie et 2) que l’inflation touchait en premier lieu les plus pauvres, puisque les postes de dépenses qui augmentent le plus (alimentation, énergie) représentent une plus grande part de leur budget.


Mais Christine Lagarde en tire des conclusions complètement à rebours de cette analyse et, fidèle à sa tradition libérale, emmène la politique monétaire européenne dans une pente extrêmement dangereuse. Qui risque de nous coûter gros en aggravant la récession qui se profile. Concrètement, ce qu’espère la BCE en augmentant les taux d’intérêt, c’est que les ménages et les entreprises empruntent moins et dépensent moins, ce qui aura pour effet de diminuer la demande et donc la tension sur les prix. Dans les livres d’économie libéraux, ça fonctionne comme ça, mais pas dans la réalité. Ici, l’inflation n’est pas tant liée à un excès de la demande qu’à une perturbation de l’offre par l’effet combiné des confinements et de la crise énergétique liée à guerre en Ukraine qui se répercute sur l’ensemble de l’économie.


Christine Lagarde est consciente de ça, mais elle redoute quand même par-dessus tout que ne s’enclenche une spirale “prix-salaires” par laquelle une augmentation des prix entraînerait une augmentation des salaires qui entraînerait à leur tour une augmentation des prix, et ainsi de suite. Une fable, reprise à l’envie par Emmanuel Macron, pour justifier le refus d’augmenter les salaires. Une fable, largement battue en brèche par… le FMI, dont Christine Lagarde était à la tête avant d’aller à la BCE ! (Oui ça n’arrivera pas souvent que je cite le FMI en référence). Dans une étude récente, le FMI démontre non seulement que la boucle prix-salaires n’a aucune vérification empirique, mais que « les risques d’une spirale prix-salaires semblent maîtrisés, malgré une inflation élevée » et « une accélération durable des salaires et des prix est peu probable »


Mais cela n’empêche pas la BCE de continuer sans fin à augmenter les taux afin de contracter la demande. Et contracter la demande, quand on le fait de manière générale et non-ciblée, ça veut dire très concrètement ralentir l’activité et favoriser la récession. Et tout le lot de galères que ça implique pour les gens. C’est la double peine pour les plus pauvres : 

  • D’une part, l’inflation ronge leur niveau de vie réel et les appauvrit

  • D’autre part, l’augmentation des taux fragilise l’économie et par ricochet les personnes servent malheureusement de « variable d’ajustement » en temps de crise. 

En résumé, la BCE assume de créer du chômage et de la précarité pour respecter l’objectif des 2%... qu’elle risque très probablement de ne pas atteindre de cette façon ! Car pour lutter contre l’inflation, nous avons des idées bien plus directes et efficaces : contrôle ciblé des prix, taxe sur les superprofits des profiteurs de crise dans tous les secteurs, reprise en main des secteurs essentiels sous contrôle public, relocalisation, etc.

En plus de cela, Christine Lagarde a le culot de dire que les mesures budgétaires de soutien aux ménages et aux entreprises sont contre-productives car elles risquent d’entraver l’action de la BCE, ce qui pousserait la BCE à durcir encore davantage sa politique monétaire ! Derrière les chiffres et le jargon économique, il y a des vies humaines. Voilà pourquoi, je continuerai à me battre pour démocratiser la politique économique et monétaire européenne. 

Et pourquoi nous devons collectivement en reprendre le contrôle. 

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