Faut-il maintenir le tarif réglementé du gaz ?
Face à l'explosion des prix, il faut maintenir les tarifs réglementés de vente, revoir notre politique énergétique, construire un véritable service public.
Nos factures de gaz explosent : le prix du mégawattheure (MWh) a augmenté de 20 euros en France entre 2007 et 2018. Dans ce contexte, les tarifs réglementés, qui bénéficient à un consommateur de gaz sur deux, sont un bouclier essentiel pour le pouvoir d’achat des classes populaires. Fixés par les pouvoirs publics, ils résistent aux instabilités du marché et protègent des hausses de prix. Défendre ce mécanisme, quand les plus fragiles sont contraints de choisir entre se nourrir ou se chauffer, est une urgence absolue.
Car ces tarifs sont censés disparaître le 1er juillet 2023. La raison ? Ils ont été jugés incompatibles avec les règles européennes qui imposent d’ouvrir l’énergie à la concurrence. Les concurrents des opérateurs qui proposent le tarif réglementé n’ont eu de cesse d’attaquer ce mécanisme, espérant récupérer un marché juteux pour actionnaires voraces. C’est finalement Macron qui a tranché : pour défendre comme toujours les intérêts privés, il a imposé dans sa loi climat, au nom des règles européennes, la disparition des tarifs réglementés.
Pour les consommateurs, ce sera donc la jungle des offres et des prix. Des associations, comme l’UFC-Que choisir, tentent de les orienter vers des offres à prix fixe plus protectrices. Mais que pèsent-elles face aux vampires du Far West de l’énergie ? Dès l’annonce de la fin des tarifs réglementés, les fournisseurs ont démarché à domicile des consommateurs vulnérables, à qui ils font miroiter des prix cassés, sans leur dire qu’ils pourraient être multipliés par quatre selon l’état du marché. Le médiateur national de l’énergie, saisi par des milliers de citoyens, s’est d’ailleurs alarmé des « discours insidieux, des informations tronquées, voire mensongères ». Une personne de 98 ans a même vu un contrat de gaz activé pour sa maison alors qu’elle résidait en maison de retraite. Voilà ce qu’engendre la « concurrence libre et non faussée » chère à Macron et à l’Union européenne. Une personne âgée se fait rouler par des entreprises véreuses obsédées par leurs profits. Au troisième rang de l’entreprise la plus abusive (qui assure depuis avoir arrêté), on trouve Total, qui a réalisé en 2021 le plus haut bénéfice de tous les temps.
Face à ces rapaces, Macron nous balade. Il envoie son ministre de l’Économie dire que le marché européen « ne marche pas et est aberrant ». Mais il refuse de désobéir aux règles européennes absurdes et le blocage du prix tardif, et à un tarif déjà élevé, exclut les copropriétés privées et offices HLM, où les habitants sont souvent très précaires.
Nous ne sortirons pas de cette crise avec quelques pansements sur une jambe de bois. Il faut sortir l’énergie du marché, renationaliser le secteur et en faire un bien commun protégé des spéculateurs. À cette condition seulement, nous pourrons nous assurer que se chauffer ou se faire à manger ne devienne pas un luxe pour des millions de gens qui subissent déjà de plein fouet la hausse généralisée des prix.
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